Titre
Retour au menu

Assez critiqué l’administration… on reprendra ça plus tard. Passons maintenant aux arrestations de malfaiteurs, ainsi qu’aux nombreux avatars divers et variés ; après tout, la police est un peu faite pour ça, non ?

Si je voulais faire une classification des tâches, je pourrais, par exemple, attribuer cette spécialité à la brigade de nuit, championne du genre grâce aux premiers intéressés : messieurs les voleurs qui ont tendance depuis la nuit des temps de “travailler” la nuit. Je laisserai aux polices-secours les accidents de la route, le maintien de l’ordre aux Ci (Compagnies d’intervention) ou CRS (Compagnies républicaines de sécurité). Mais cette classification serait arbitraire, car c’est toujours le hasard des événements, souvent imprévus, qui désigne le premier intervenant.

 
  • Le pantalon bleu

Années 64 à 71, lieutenant à la brigade “N” du septième arrondissement. (J’en ai déjà parlé). Le service des plantons devant les ministères mis en place, mon rôle est de parcourir l’arrondissement avec un équipage réduit : un chauffeur, un ou deux hommes de préférence en tenue civile, pour le contrôle des points de service et toutes interventions sur la voie publique. Une info diffusée sur les ondes est entendue par tous les véhicules en mouvement ou à l’arrêt, par tous les postes fixes des commissariats.

La radio est donc un instrument précieux. elle permet le rassemblement d’un renfort de personnel à tout moment.
A l’occasion d’une de ces rondes, j’entendis le car du 7e annoncer son départ pour un cambriolage en cours place de Breteuil. Arrivés sur place, une personne âgée, la requérante, nous attendait. elle m’expliqua que, logée en sous-sol d’une teinturerieblanchisserie-pressing, dont elle était plus ou moins la gardienne de nuit, elle avait entendu des bruits de pas provenant du magasin. D’autre part, elle ajouta avoir prévenu
le propriétaire domicilié en proche banlieue. elle n’avait fait aucun bruit de nature à faire fuir les malfaiteurs qui devaient encore être sur place.

Avec l’effectif de la police-secours, j’avais investi l’immeuble, personne n’en était sorti. il ne nous restait plus qu’à entrer dans le magasin. Aucune effraction, aucune vitre brisée, aucune issue possible. Comment donc étaient-ils entrés ? Je commençais à douter lorsqu’un gardien me signale avoir vu un homme, ou plutôt les deux jambes d’un individu dissimulé derrière des vêtements. Deux jambes dans un pantalon bleu-marine “un pantalon comme les nôtres, chef.”, précisa mon informateur.Il devenait vraiment nécessaire de pénétrer dans ce magasin. entre temps, le propriétaire était arrivé, nous pûmes entrer sans rien casser.

Une surveillance extérieure mise en place pour parer à une fuite possible, avec le brigadier et deux hommes, nous fouillons partout. il y avait des vêtements nettoyés en attente de livraison, d’autres à nettoyer, bref de nombreux coins et recoins propices aux cachettes. rien… on ne trouvait rien. restait le sous-sol. Un escalier étroit et raide y conduisait.

Avant de m’y engager, j’armais mon FM et, debout sur la première marche, je fis les sommations… j’entends : « Bon, d’accord, je me rends. » Juste derrière moi, dans un petit renfoncement que je n’avais pas remarqué, je vois un jeune les mains en l’air. Il n’avait qu’à pousser et je dévalais l’escalier. Le bruit de la culasse et la présence de mes collègues l’ont sûrement dissuadé à agir.

Nous en avions donc un. où était l’autre, ou les autres ? impossible qu’il soit seul malgré ses affirmations. Les recherches continuèrent, toujours sans résultat et je m’apprêtais à les abandonner lorsque le gardien premier intervenu me tire la manche : « Chef ! il n’a pas de pantalon bleu, j’ai vu un pantalon bleu, y’en a un autre !». C’était logique.

En passant devant un gros tas de linge sale, un autre gardien donne un coup de pied au hasard et… le linge sale crie “aie !”. on avait les deux, d’accord, mais ça ne nous expliquait pas comment ils étaient entrés.

C’est eux-mêmes qui eurent l’amabilité de nous l’expliquer. ils étaient jeunes, souples et minces. ils avaient fracturé un petit soupirail au ras du sol et s’étaient glissés par cet accès étroit au prix de contorsions dignes d’un numéro de cirque. Dans la
rue, surtout la nuit, il fallait vraiment se mettre à plat ventre pour voir cette ouverture.

Je me demande encore quel trésor avaient-ils compté trouver dans cette boutique ?

Retour au menu
Logo APP